Les grands courants artistiques du Vietnam
Le Vietnam possède une double culture : chinoise au nord et indienne au centre et au sud. C’est une distinction qu’il faut prendre en compte si vous projetez de réaliser votre voyage au Vietnam sur mesure : incluez ces deux facettes est indispensable pour découvrir les richesses historiques du Vietnam. De cette dernière naquirent, au début de l’ère chrétienne, deux empires : le Châmpa qui comprenait la Cochinchine et la partie méridionale de l’Annam et le Fou-Nan qui s’étendait sur toute la partie occidentale de la péninsule indochinoise en incluant le Cambodge. Les Châms (ou Câms), habitants du Champa, considérés comme les « Vikings de l’Asie » étaient de grands marins. Ils avaient mis au point une agriculture perfectionnée grâce à un système ingénieux de rizières en escaliers. Ils construisirent des monuments en brique (kalan) en forme de tours dédiées au culte de Shiva. Le site de Mi-Sôn, à une cinquantaine de kilomètres de Danang, offre le spectacle éblouissant de ruines entourées de hautes collines, datant de la fin du VIe siècle. Elles sont orientées à l’est et à l’ouest et précédées d’un vestibule, à l’image des temples hindous. Les ruines de Mi-Sôn ont livré une grande quantité d’inscriptions en sanskrit et en châm, gravées sur des stèles en grès ou des piédestaux. Les sculptures, exposées au musée de Danang (l’ancien musée Parmentier), représentent la vie d’ermites au milieu de montagnes boisées, peuplées de sangliers et de tigres. Parfois apparaissent des porteurs d’offrandes et des génies célestes ; ici, nous assistons à un concert de musiciennes, à une démonstration de danseuses, kà, à un sacrifice auprès d’un arbre. La cité sacrée de Mi-Sôn représentait un haut lieu de pèlerinage ; on sait à présent qu’elle n’était habitée que par les Brahmanes (première caste sacerdotale hindoue) et les serviteurs du dieu. Vers la fin du IXe siècle, sous le règne d’Indravarman II (875-880), un nouveau centre religieux fut construit. Il s’agissait d’un monastère bouddhiste placé sous la protection du bodhisattva Lokeçvara (Avalokiteçvara). Sur ce site, à Dông Duông (province de Quang-nam), les temples sont de proportions plus imposantes. Le Châmpa atteint son épanouissement entre le VIIe et le IXe siècle. Face à la mer, le temple de Pô-Nagar servit souvent de repaire aux pirates chams qui, de retour des mers de Java et de Chine, croisaient au large. La déesse, qui siégeait dans ce sanctuaire, était « la dame de la Cité » que les textes sanskrits nomment Bhagavati. Les Chams la vénèrent toujours car elle représente Uma-Parvati, l’énergie féminine du dieu destructeur Shiva. Vers la fin du Xe siècle, le Châmpa fut inexorablement repoussé vers le sud, au Binh Dinh et sa capitale s’appellait Vijaya. Autour des nouveaux sanctuaires s’élevaient des tours dites « d’argent », « de cuivre », « d’ivoire » et « d’or ». Les temples demeurèrent fort beaux, mais ils faisaient penser à des tours de guet, la parure sculptée devint plus conventionnelle, se schématisa ; le rinceau se transforma en arabesque. L’art Cham entamait son déclin.
La culture chinoise demeure au Vietnam, la plus riche, en raison de la longue occupation de « l’Empire du Milieu » durant plus de dix siècles. Les premières véritables manifestations artistiques sont les tambours de bronze du Musée de Hanoi (Musée Finot). Leur décoration évoque la vie des peuplades de chasseurs et des marins voguant sur de grandes barques qui pourraient bien être à l’origine des jonques que l’on peut toujours voir naviguer dans la baie d’Halong. A cette civilisation du bronze, on peut opposer les tombeaux en briques des fonctionnaires chinois établis au Tonkin dès le Ier siècle de notre ère. On y a retrouvé des miroirs, des fonds de bassins sur lesquels sont gravés des poissons et des oiseaux, des poteries recouvertes d’une matière vitrifiée de couleur crème. Certaines tombes du Tonkin, nous ont révélé des modèles réduits de maisons (le musée Guimet à Paris en possède plusieurs), ou de fermes du plus haut intérêt pour l’histoire de l’architecture de la Chine antique. Au Xe siècle, les ambassadeurs chinois des Song décrivent le Vietnam aux villes percées « de portes monumentales en forme de pavillons ». Hanoï est fondée, le palais du souverain comporte quatre étages sculptés de dragons et de cigognes peints en rouge et laqués, les sols sont revêtus de dalles de terre cuite ornementées. Le pays se couvre de pagodes parées de poteries émaillées à motifs floraux et animaux. Sous les Lê postérieurs (1428-1788) sont érigées les plus belles pagodes et maisons communes (Dinh). A cette époque, Hanoï reçoit son « temple de la culture littéraire », aux cours dallées ou gazonnées et aux petits bâtiments abritant tablettes et autels. Auprès d’un bassin carré « où se reflète l’éclat pur du ciel », se dressent sur d’immortelles tortues de pierre, les stèles commémorant les examens littéraires. Avec la dynastie des Nguyên, s’ouvre une ère nouvelle dans l’art du Vietnam. Sous le règne des premiers empereurs, les Français construisent des citadelles « à la Vauban », comme celle de Hué qui influencent l’architecture religieuse. On ressent, dans l’ordonnance des sépultures impériales de Hué, l’influence de la Chine des Qing (1644-1911) et le grand siècle de Louis XIV, dans un décor orientaliste de fleurs et d’arbres exotiques. Le Vietnam excelle dans la sculpture sur bois doré, mais rares en sont les témoignages. Seul demeure l’art de la céramique. C’est sans doute les Chinois qui apprirent aux habitants du delta du Fleuve Rouge à façonner leurs premières poteries au tour, à les revêtir d’une couverte brillante et à les décorer de motifs incisés ou en relief.
A l’époque Song, vers le Xe siècle, apparaissent de grands vases cylindriques, à couvercle représentant un motif animalier, décorés de rinceaux brun rouge se détachant sur un fond maïs ou blanc crème. Au milieu du XVIe siècle, les fours de Bat-Trang, produisent une belle qualité de faïences fines qui se déclinent en théières, brûle-parfum, chandeliers et vases de pagodes. Finalement, au XIXe siècle, les Vietnamiens préfèrent faire venir leurs céramiques de Chine et les célèbres « bleus de Hué » proviennent pour la plupart des grandes manufactures chinoises de Fou-Nien ou de Jingdezhen. Le travail de la laque demeure aujourd’hui le plus important. Il s’exprime à travers meubles, panneaux incrustés de nacre ou d’ivoire. La laque peut être noire ou rouge par addition d’oxyde de fer. Une vingtaine de couches sont indispensables pour obtenir une surface lisse et douce au toucher. L’or ne s’emploie que pour des pièces de choix et il est, le plus souvent, remplacé par de l’argent qui, à travers la dernière couche de laque transparente et l’huile d’abrasin prend un ton mordoré.
Les principaux éléments symboliques de l’art du Vietnam
Les Animaux
Le Dragon est représenté entouré de nuages. Il est moitié tigre, moitié serpent et symbolise l’empereur. Il préside aux eaux et à la pluie en temps de sécheresse. Il représente la force des éléments célestes. Le Phénix est le symbole de l’impératrice et de tout ce qui est féminin. La Licorne, « cheval dragon », représente la force. La Tortue incarne la longévité et la solidité. Elle soutient les stèles funéraires. Le Poisson est signe d’abondance. La Chauve-souris symbolise le bonheur. Le Lion est le défenseur de la loi bouddhique et protecteur des édifices sacrés. Au nord, il symbolise la clémence. Le Tigre symbolise la force terrestre.
Les Huit Fruits
Huit fruits font partie de la symbolique dans les arts vietnamiens : la pêche (porte-bonheur), la grenade, la prune, la poire, « main de Bouddha » (au goût de pamplemousse, symbole de fécondité), la pomme-cannelle, le raisin et la courge.
Les Huit Joyaux
Les « huit précieux objets » sont placés devant les génies des pagodes et devant les décorations artistiques : ailes du chapeau de mandarin symbolisent le grade de docteur ès lettres ; les deux pinceaux, symboles du trait ; les livres et épée car la connaissance des armes était exigée lors des concours. Le livre est parfois symbolisé par un rouleau de papier car avant l’invention du papier, on roulait les feuilles d’arbres sur lesquelles on écrivait ; la gourde à alcool car le lettré composait des poésies sous l’effet de l’alcool. Cette gourde représente l’abondance de biens ; la corbeille de fleurs car les fleurs sont recueillies en promenade, placées sur la table elles deviennent une source d’inspiration pour le docteur ; les instruments de musique avec cithare et flûtes ; le Kim-Kanh ou pierre sonore qui sert de presse-papiers ; l’éventail, réservé aux lettrés.
Les Plantes
Les plantes des saisons : le prunier ou hiver, la pivoine ou printemps, le lotus ou été, et le chrysanthème ou automne. Les plantes amies : le pêcher, arbre de vie du Paradis ; le lotus symbole de pureté ; la pivoine qui représente la richesse ou le bonheur ; le pin toujours vert, symbole de vigueur ; le bambou ou arbre de la vie terrestre qui incarne la philosophie, la sagesse qui aide à supporter la vie. Une branche de bambou figure en tête de tout enterrement et est l’image de la vie détruite.